∞ dance with me tonight.

« im ga won ft. song jun ho. •• .unbreakable »

Le visage de Ga Won était tordu en une moue indescriptible, un mélange de colère, d'ennui et de tristesse, et il arborait cet air depuis le début de la journée. Ses traits tirés, qu'accentuait la fatigue qui lui pesait, ne faisait qu'en rajouter à son expression qu'on devinait facilement être un avertissement, une alerte tentant de prévenir les autres de ne pas trop l'approcher aujourd'hui. S'il arrivait habituellement à garder un moral assez bon malgré tout ce qu'il y avait d'horrible autour de lui, il y avait évidemment de pires jours - exactement comme celui-ci. Dans ces cas-là, lorsque tout dérapait, il semblait alors prêt à tuer littéralement quelconque être qui oserait l'offenser, et Dieu n'était pas le seul à savoir qu'il lui en fallait peu pour être offensé - bien que, cela dit, il n'eut jamais vraiment porté Dieu dans ses croyances. Personne n'avait heureusement eu la chance de le croiser aujourd'hui, probablement parce qu'il avait passé une grande partie de l'avant-midi perché dans un arbre, les bras croisés, à bouder le monde entier, le monde et le reste de l'univers.

Ce genre de jours lui arrivait aussi avant qu'il ne soit coincé en plein milieu de l'océan, et il s'arrangeait la majorité du temps pour demeurer enfermer chez lui, ou alors il... Dansait. Sa grimace connut une minime pause à cette idée, avant de reprendre de plus belle. Pour danser, il fallait de la musique. Et c'était plus motivant avec quelqu'un. Or, il n'avait ni musique - l'idée de chanter l'horripilait, il avait une voix affreuse -, ni partenaire - probablement le seul inconvénient à cette vie d'ermite qu'il menait depuis son arrivée. Il était donc condamné à ruminer un tas d'idées noires du haut de son arbre, à attendre que la vie passe et à se laisser crever là-haut en fait... Fronçant les sourcils, il se redressa avant de soupirer. Sérieusement, il allait se priver de danser pour un manque de son et de faire-valoir à ses côtés ? Évidemment que non, rien n'empêchait Im Ga Won de mouvoir son corps parfait, et c'est presque en souriant qu'il redescendit de son perchoir, s'étirant une fois rendu au sol.

Il commença ses figures en entonnant sommairement un air pop qu'il avait entendu de nombreuses fois lorsqu'il pouvait toujours écouter la radio, puis, une fois bien réchauffé et suffisamment concentré sur ce qu'il faisait, il se tut, les bruits de l'île lui servant de trame sonore alors qu'il sautait et virevoltait, qu'il se déhanchait allègrement de sa souplesse féline. Jamais il ne se sentait mieux que dans ces moments-là, jamais il n'était aussi vivant, aussi lui-même que lorsqu'il dansait... Et c'était ce pourquoi il devait retourner à Séoul, ce pourquoi il ne pouvait rester ici. Il trouverait un moyen de s'enfuir : il avait déjà entamé l'exploration de l'île et comptait bien la ratisser jusqu'à trouver une issue... Parce qu'il devait bien y en avoir une, non ?

La routine dura une bonne dizaine de minutes et s'acheva lorsqu'il s'accroupit au sol dans une figure de finale, le souffle rapide, mais toujours silencieux. Fini, déjà. Il devait recommencer, vite, et il se relevait en tournant lorsque ses yeux se posèrent sur une silhouette... Une silhouette, que dis-je, cette silhouette, cette forme musclée et virile, cet alliage parfait de force et de contrôle, ce mâle, ce... Le jeune Im ferma sa vilaine bouche qui s'était ouverte malgré lui et prétendit être occupé avec la contemplation des arbres, comme un idiot, parce que l'autre approchait et qu'il devait feindre une surprise normale de le voir, feindre une surprise et cacher la joie dont l'apparition l'emplissait. Tant pis pour la danse, il reprendrait quand il serait parti. À moins que... Ohhhh, oui ! Oubliant toute tentative de surprise, il se précipita vers Junho en courant presque.

- Jun Ho, danse avec moi.

Lui ordonna-t-il sans le moindre bonjour, tentant d'afficher son air énervant et énervé habituel.

Il avait beau avoir l'habitude d'être seul, jamais il ne s'était senti aussi solitaire qu'aujourd'hui. Et ce, même pas venant de lui. Il semblerait qu'aujourd'hui, dans la case aux scientifiques, personne n'était enclin à discuter, à se sociabiliser. Ou peut-être tous se sentaient comme lui, seul et pathétique dans leur petite chambre confinée sous terre, et qu'ils se complaisaient dans leur doux malheur. Parce que c'est dans ces moments là qu'on pense réellement; au passé, à l'avenir, à soi. Il s'était rendu sur cette île afin de s'amuser. Lui qui n'avait jamais manqué de rien sauf de ses parents et de sa famille en générale, s'était dit que venir ici, vu qu'il n'avait plus vraiment d'attaches, ne le gênerait pas et ne lui ferait pas de mal. Cependant, il faut bien le reconnaitre - mais surtout pas à haute voix, gardons le bien caché au fond de soi, qu'il s'était trompé et bien méchamment. Tout lui manquait, ses parents qu'il voyaient peu mais quand même, ses connaissances, les lieux où ils se rendaient souvent, ses études. Ici, on s'ennuyait assez, même si certaines personnes sur l'île pour être des études de cas pour des cours de psychologie, franchement. C'était une île, certes, avec un paysage dignes de la gagnante des concours des cartes postales, le temps était beau et chaud, la pêche, la cueillette et la chasse étaient fructueuses, et? Tout le reste était morne, terne et sec: le temps ne passait pas, les gens aigris, la joie de vivre quasiment abandonnée.

Heureusement, chez certains, l'espoir était tenace ainsi que l'ambition. Alors, essayer de les garder loin de la base était distrayant, les manipuler était intéressant et faire des rencontres étaient amusant. Mais le jour où tout le monde aura abandonné, que se passera-t-il? Le brun soupira et se leva de son lit où il ruminait depuis une bonne vingtaine de minutes. Ses cheveux et son torse luisait encore dû au fait qu'il s'était mal séché en sortant de la douche. Il finit donc cette tâche et enfila des vêtements ne paraissant pas trop propre histoire de ne pas sembler étrange aux yeux des habitants de l'île. Il se mit en route afin de faire son boulot: contenir les électrons libres.

En marche depuis plusieurs minutes, il ne se soucia pas du bruits environnants, se disant que si une bête venait à surgir pour le bouffer, qu'elle le fasse. Il lui arrivait d'être fataliste mais au final, sa volonté et son orgueil prenait toujours le dessus et c'est pourquoi, c'est la bête qui devait craindre d'être mangée, et non lui. Le brun souffla, il était enfin arrivé au campement, murmures et rires circulaient mais aussi et surtout, visage défaits, odeur de mal-propre et ambiance plutôt pesante. On ne le regardait que très peu, pour tout le monde, il était l'un des élèves du bus, et il n'attisait alors aucune curiosité. Il s'avança encore et encore jusqu'à voir une silhouette en retrait par rapport aux autres. Une silhouette élégante et svelte qui virevoltait comme si le vent la portait gracieusement, lui donnant un air angélique. C'était le petit Im qui s'amusait à danser pour ne pas changer, mais c'était surtout le gêneur Im, qui n'hésitait pas à s'aventurer trop loin sur l'île pour fouiner là où ça ne le regardait pas. Jun Ho le trouvait étrange, plutôt excentrique, mais intéressant et parfois drôle. Il était juste... difficile à supporter! Mais ma foi, il était tout de même raisonnable et savait se calmer avant que cela ne barde trop. Du moins, c'est ce que le baraqué imaginait.

Le brun s'approcha donc de lui, le regard neutre mais d'après les autres durs. Sûrement que le plus jeune l'avait remarqué puisqu'il dévia le visage vers les arbres. Ne voulait-il pas le voir? Jun Ho avait-il fait quelque chose de mal dont il ne se serait pas rendu compte? Impossible! Il s'en souviendrait! Et depuis quand Jun Ho faisait quelque chose de mal? Cela n'arrivait que très peu de fois, il en était convaincu! Le plus jeune se mit à courir à folle allure vers lui et le brun ne savait que faire face à ça, il s'arrêta donc et attendit que l'autre arrive près de lui. Pas de bonjour, pas de s'il te plait. Tu rêves mon petit gars! Le scientifique s'approcha, posa ses mains sur les épaules du danseur et le fit se courber.

-On s'incline pour saluer ses ainés.

Il le laissa se remettre droit et le regarda d'un air sévère, et dans un ton péremptoire répondit:

-Hors de question que je danse. Et enlève moi ce regard pouilleux, c'est pas comme ça que t'obtiendras quelque chose, et encore moins de moi!

Il était dur certes, mais il n'appréciait pas qu'on agisse de la sorte avec lui, même s'il faisait de même avec les autres, c'était ainsi. Jun Ho se demanda alors comment allait réagir le brunet, crise de capricieux? Ignorance? Baston? Il lui lança un petit regard hautain, histoire de le défier un petit peu, pour voir, pour jouer un peu.