Eun-Mi & Ashvini
© KaijiDepuis quelques jours j’étais là, prisonnière d’une île au beau milieu de nulle part. Une île déserte. Probablement inconnue de la terre entière. À mon réveil après le crash, j’étais couché sur une lande de terre humide, la mer venait me fouetter de ses vagues, je crois que c’est ça qui m’as réveillé… Honnêtement, je crois que j’aurais préféré ne jamais rouvrir les yeux plutôt que de voir cela. Comment décrire ce sentiment de terreur qui s’était insinué en moi lorsque mes prunelles azurés avaient embrassé le paysage pour la première fois? J’étais loin de l’aéroport dans lequel j’étais sensé atterrir en terre de Chine.
Je n’aurais pu dire dans quel genre d’endroit je me trouvais. Certes le paysage est magnifique et il vaut la peine qu’on s’y attarde, mais en ce moment, je le maudit plus qu’autre chose. Qu’avais-je fais pour mériter cet affront? Pourquoi me punissait-on? Je n’en avais aucune idée.
Depuis mon arrivée, je n’ai pas beaucoup bougé de la plage, je n’osais pas vraiment m’aventurer sur cette terre inconnue, de peur de faire d’horrible rencontre. Je ne sais pas moi ce qui peut vivre dans cette forêt ? Des créatures sauvages ou encore des gens qui m’en veulent pour je ne sais quelle raison. Qui sait, c’est peut-être eux qui avaient orchestré ce crash d’avion?
Le visage enfoui entre les mains, je n’avais qu’une envie, celle de pleurer comme une enfant. Pleurer et pleurer encore pour me laver de toutes mes peines. Comme j’aurais aimé que mon père soit ici pour me serrer contre lui. Ou encore un de mes frères, les personnes que j’aimais le plus au monde. Ces personnes qui depuis ma tendre enfance était là pour moi, pour me protéger et me défendre contre la terre entière s’il le fallait. J’aimerais tant entendre la voix rocailleuse de mon père me racontant une histoire comme quand j’étais petite, le genre d’histoire sans queue ni tête, simplement une histoire pour me faire oublier dans quel pétrin j’étais maintenant.
Mais plus je restais là, immobile le visage dans les mains, plus je me disais que je n’arriverais à rien si je restais ici. Je reniflai un bon coup avant d’essuyer les larmes qui s’étaient échappé de mes yeux, ce qui n’eut pour effet que me remplir le visage de sable. Je sentais la texture granuleuse exfolier ma peau au passage. Puis je me relevai, face à la mer de je ne sais où. Je laissai échapper un soupir qui fut emporté par le vent chaud.
«
Gremul, gremul…»
Et voilà que mon estomac s’y mettait, il est vrai que je n’ai pas avalé grand-chose depuis que je suis ici… Je serrais mes mains contre mon ventre et tourna le dos à la mer. Je sentis mes cheveux voleter dans le vent, mais j’avais le regard fixe, je n’aurais d’autre choix que de me rendre dans cette forêt si je voulais manger. Car ce n’est pas dans le sable qu’on pouvait trouver de quoi casser la croûte.
J’avançai tout d’abord d’un pas hésitant, puis d’un autre… Ok, je me devais d’y aller. Pénétrer dans cette forêt que je trouvais menaçante. Mais ces arbres n’allaient pas me bouffer tout rond non plus. Et qui sais, peut-être n’aurais-je pas à aller si loin pour trouver de quoi me mettre sous la dent. Je pénétrai donc dans la pénombre des arbres, délaissant ainsi les chauds rayons du soleil qui dorait ma peau. Les bras serrer tout contre moi, je me mise à marcher d’un pas sûr la tête haute, tout en observant où me guidait mes pas. Je marchais de plus en plus vite, comme il n’y avait pas, tout ce que je savais c’est que je me dirigeais vers l’ouest.
Le terrain devenait un peu plus accidenter à mesure que j’avançais, mais maintenant plus rien ne pourrais m’arrêter, j’avais l’intime conviction que j’arriverais quelque part ou je pourrais manger. Et peut-être boire aussi, car je me devais de l’avouer, en plus d’avoir l’estomac dans les talons, j’avais la gorge plutôt sèche.
Je ne savais pas depuis combien de temps je marchais, mais je fini par déboucher sur une jolie clairière où une chute d’eau coulait dans un jolie tintamarre. Un sourire étira mes lèvres, probablement le premier depuis des jours. Même le bruissement des arbres mêler au bruit de la cascade avait fini par m’apaiser. Je m’approchai donc doucement, comme pour ne pas déranger la nature qui laissait libre cour à son art. Je me penchai pour tremper mes mains et fut surprise par l’agréable fraîcheur de l’eau. Je mis donc mes mains en coupe pour recueillir de cette eau et m’en abreuver.
Puis, prise d’une soudaine spontanéité, je décidai de me dévêtir pour me retrouver en sous-vêtement et de plonger dans cette eau, pour me laver de cette poussière qui encrassait ma peau. J’oubliais presque l’endroit où j’étais tant l’eau était bonne et me rappelais mes jours d’enfance quand j’allais me baigner dans un lac non loin de chez moi. Même le paysage se rapprochait un peu des paysages indiens.
Mon pays d’origine me manquait, même les États-Unis que j’avais tant détestés la première fois que j’y avais mis les pieds me manquaient. Ma famille, mes amis… Mais pour l’espace d’un instant dans cet idyllique endroit je n’y pensais plus. En fait, je ne pensais plus à rien du tout…